JUSTICE

Devant le tribunal après la manifestation à Amiens: «Il y a une volonté de museler les militants»

Le militant de gauche Romain Ladent espère la relaxe ce jeudi 13 février devant le tribunal d’Amiens après son interpellation lors d’une manifestation des Gilets jaunes en octobre dernier.Réagir Mis en ligne le 11/02/2020 à 17:35 

par Gautier LecardonnelRomain Ladent, défendu par M
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 Stéphane Diboundje, se sait dans le collimateur des autorités pour son activisime militant.Romain Ladent, défendu par M e Stéphane Diboundje, se sait dans le collimateur des autorités pour son activisime militant.

C’était la dernière manifestation très « chaude » des gilets jaunes à Amiens. Le samedi 5 octobre, des casseurs s’étaient mêlés aux 450 manifestants. Dans le quartier Saint-Pierre, les abribus, horodateurs et conteneurs en ont fait les frais. Et les policiers, caillassés. À l’issue de ces débordements, deux personnes ont été interpellées : Romain Ladent, 43 ans, et Titouan Bisson, Parisien de 20 ans. Leur procès a lieu ce jeudi 13 février devant le tribunal correctionnel.

Les dégradations et les violences envers les forces de l’ordre ne sont pas reprochées à Romain Ladent. Il est renvoyé en justice pour ne pas avoir obtempéré aux ordres de dispersion, avoir été porteur d’une arme (un cutter), et ne pas s’être soumis aux prélèvements ADN. Les ordres de dispersion ? « Je ne les ai pas entendus. Et puis, si ça avait été le cas, je ne vois pas pourquoi il sont intervenus à ce moment-là. Les violences avaient cessé, c’était redevenu festif. Et je ne vois pas où je pouvais aller si j’avais entendu ces ordres ! » L’arme ? « C’est un cutter qu’ils ont trouvé dans mon sac, et que j’utilise pour mon travail. Ça aurait pu être des ciseaux  ! » Le refus de prélèvement ADN ? « C’est idéologique »

Son avocat : « Pourquoi on n’arrête pas les blacks blocs ? »

Me Stéphane Diboundje, son avocat, va plaider la relaxe. Pour lui, l’accusation ne tient pas. « J’ai été interpellé parce que je suis Romain Ladent. Ça fait longtemps que je suis dans leur collimateur. Je savais très bien que le moindre prétexte serait trouvé. J’ai toujours assumé ce que je faisais, et c’est toujours face visible », commente l’Amiénois, militant actif au sein de collectifs de gauche, qui avait notamment été interpellé en 2018 lors d’une manifestation devant la permanence de la députée (LREM) Barbara Pompili. « Cela pose une vraie question de liberté », expose Me Diboundje, pour qui le ciblage de son client ne fait aucun doute, alors même qu’il n’a participé à aucune violence : « Pourquoi on n’arrête pas les blacks blocs ? Tous ces casseurs, on les laisse, et on va chercher Romain Ladent. Pourquoi ? »

Les députés (LFI) François Ruffin et Caroline Fiat (Meurthe-et-Moselle) ont versé une attestation de moralité au dossier : « La violence, les armes, les coups n’entrent pas dans son registre », écrit l’élu de la Somme.

« J’avais prévu de m’investir dans la campagne des municipales… »

Pour le militant amiénois, cette procédure n’est en rien étonnante. Elle est même logique, dans le contexte actuel : « Il y a la volonté de museler les manifestants, qui ne font qu’user de leur droit de manifester. On a une répression massive du mouvement social. Cela a commencé il y a trente ans dans les quartiers populaires et ça s’est étendu ».

La « muselière » de Romain Ladent, c’est ce contrôle judiciaire que la justice lui a imposé en attendant son procès. Il a interdiction de manifester. Dès lors, son implication dans les élections municipales amiénoises – au sein du collectif Pas sans les Amiénois – était réduite à quasi-néant : « C’est l’une des raisons pour lesquelles je ne me suis pas présenté. Depuis quatre mois, je ne peux même pas tracter. J’avais prévu de m’investir dans la campagne, accélérer les choses, interpeller le maire, etc. Cette procédure a des conséquences négatives sur mon engagement politique ».Les violences policières en débat avec David Dufresne ce mercredi

Une soirée de soutien à Romain Ladent et Titouan Bisson est organisée ce mercredi 12 février à partir de 18 h 30 au Micmac, rue Lescouvé à Amiens. Le thème : « Face aux violences policières, à quand la convergence ? » Romain Ladent a certes vécu une interpellation en douceur, mais, selon lui, le thème de la soirée est justifié : « Nous sommes dans une violence institutionnelle. Il y a les violences physiques, mais aussi les violences psychologiques ».

David Dufresne, auteur du livre Dernière sommation, est l’un des intervenants. Sur son compte Twitter (@davduf), son «Allo @Place_Beauvau» est devenu célèbre  : il y dénonce des cas de violences policières. Mélanie Gaham interviendra également. Cette Amiénoise avait été frappée à la tête d’un coup de matraque, de dos, lors d’une manifestation en avril 2019 à Paris. Sa plainte a été classée sans suite.

source courrier picard: https://premium.courrier-picard.fr/id68349/article/2020-02-11/devant-le-tribunal-apres-la-manifestation-amiens-il-y-une-volonte-de-museler-les?referer=%2Farchives%2Frecherche%3Fdatefilter%3Dlast5year%26sort%3Ddate%2520desc%26word%3Ddevant%2520le%2520tribunal%2520apres%2520la%2520manifestation%2520%25C3%25A0%2520amiens