Maire d’une commune rurale du Beauvaisis, le directeur d’une grosse association pour l’amélioration de l’habitat visé par une plainte pour abus de confiance.

Une maison de maître, derrière la gare de Beauvais. Mise en vente 570 000 euros par son propriétaire, cette modeste bâtisse, estimée 450 000 euros par les Domaines, appartient au CAL PACT/H&D de l’Oise. Pour une association censée tout d’abord s’occuper des mal logés, le CAL (Centre d’amélioration de l’habitat) n’est pas à la rue. Depuis quelque temps, ce siège est toutefois devenu trop grand. En deux ans, les effectifs ont été divisés par deux. Le directeur, Laurent Lefèvre, maire de Rainvillers (Beauvais), est très contesté.

Rebaptisée en catimini Centre départemental de l’habitat (CDH), l’association a perdu tous ses soutiens. À commencer par ses deux piliers, la fédération nationale des PACT (Propagande et action contre les taudis) et la fédération nationale Habitat & Développement. «  Après plusieurs courriers faisant état de retards très importants dans le versement de subventions aux particuliers, nous avons proposé un audit à cette association pour lever les doutes. Mais elle n’a jamais répondu  », explique Christian Nicol, président d’Habitat & Développement, ex-chef de la mission interministérielle pour le logement social (MIILOS).

Des e-mails alarmants

Les subventions en question – qui transitaient par le compte du CAL – sont celles de la Carsat (caisse de retraite). De nombreux mails que nous avons retrouvés prouvent à quel point la situation était tendue. «  Paiements demandés en juillet 2011 !!!!  », s’exclame impuissante cette chargée d’opération, dans un courrier avec copie au comptable. Nous sommes en mai 2012… «  Plus de 30 appels par jour, je deviens folle  », se plaint aussi cette chargée de gestion, après l’intervention d’un élu en faveur d’une de ses administrées.

Pas étonnant si la Carsat a elle aussi coupé les ponts. De son côté, le conseil général – dont la subvention de fonctionnement s’élevait à 150 000 euros par an – passe désormais par un autre prestataire pour ses opérations en lien avec le maintien à domicile des personnes âgées. Plus embêtant pour le directeur, son ancien bras droit a déposé une deuxième plainte contre X, le 30 octobre, pour abus de confiance. «  Notre quotidien, ce sont des gens dans des logements insalubres. Quand je me suis rendu compte du salaire du directeur, j’ai été écœuré  », affirme Thomas Descourvières, viré pour faute grave en juillet 2014, après avoir mis les pieds dans le plat. Dans sa plainte, cet empêcheur de tourner en rond – qui a encore engagé une procédure prud’homale – estime «  par déduction des indices laissés par le comptable  » à 100 000 euros annuels le salaire de ce directeur d’une association à vocation sociale. Il évoque aussi des notes de frais « dispendieuses.  » Pour son avocat, Me Diboundje, «  si des investigations sont menées, le juge pourrait trouver des choses.  »

Selon tous les acteurs du secteur, le CAL (en déficit de 200 000 euros en 2012), n’a pas échappé aux difficultés nées du manque d’argent public, qui a notamment fait fondre comme neige au soleil les opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH). Est-ce tout ? Claude Maillard, président, lui aussi maire d’une commune du Beauvaisis, soutient son directeur. En mai dernier, les salariés lui ont pourtant adressé une lettre pour protester contre le peu de présence de leur patron. «  Je fais mon travail de développeur. Je réponds à mon président, pas aux salariés  », lâche Laurent Lefèvre. «  Il n’y a pas de pilote dans l’avion  », rétorque cette déléguée du personnel.

Source Le Courrier Picard