L’ébéniste était aussi brocanteur… d’objets volés dans des châteaux et maisons cossues. On le soupçonne d’avoir cambriolé le père du député Édouard Courtial.

Comment un cambriolage chez le père d’un député peut permettre de résoudre une série de vols. Cette affaire, qui va être jugée prochainement, en est l’exemple.

Le 19 novembre 2002, le député (UMP) de l’Oise et futur ministre du gouvernement Fillon, Édouard Courtial, n’est pas encore le maire de la commune d’Agnetz, à côté de Clermont. Son père, Philippe, occupe cette fonction.

Cette nuit-là, l’édile s’était levé pour boire un verre d’eau, et n’avait rien remarqué. Quelques instants plus tard, alors qu’il s’est rendormi, des malfaiteurs s’introduisent dans la maison. Ils repartent avec des tableaux, des horloges et de l’argenterie. La valeur des objets volés est estimée entre 45 000 et 61 000 €.

Le cambriolage reste non élucidé, l’enquête est même close. Mais en septembre 2008, les gendarmes obtiennent un renseignement qui relance les investigations. Un certain P. serait impliqué dans ce vol, mais aussi dans d’autres demeures cossues, ainsi que dans des châteaux. La piste est sérieuse : P., aidé d’un autre homme, avait installé une nouvelle cuisine chez Philippe Courtial, entre avril et juin 2002.

Les faits ont eu lieu entre 2000 et 2008

L’enquête sur cet ébéniste qui se voulait aussi brocanteur débouchera sur d’autres affaires de cambriolages. Car au fur et à mesure, les langues se délient. P., à qui on a trouvé des complices présumés, dont trois membres d’une même famille (le fils, son père et une tante) avait une attirance pour les beaux objets des maisons cossues et des châteaux.

Celui de Domfront dans l’Oise, de Saint-Martin-d’Ablois dans la Marne, le château de Franconville à Saint-Martin du Tertre dans le Val d’Oise, ou encore une maison secondaire cossue à Bucquoy (Oise)… Les vols se sont étalés de 2000 à 2008.

Statues, mobiliers anciens, pièces d’or de collection, et même une rampe d’escalier… Le butin était stocké dans un entrepôt de La Neuville-Roy, dans l’Oise, avant d’être revendu sur des brocantes (Mers-les-Bains, Grandvillers, ou encore Douai ou Lille), des salles de vente (Senlis ou Reims), ou encore via des sites internet.

P. nie les faits. Le vol chez le père du député ? «Un complot fomenté par la famille (du parlementaire) avec le concours de la gendarmerie) »… Mais l’enquête que vient de boucler le juge d’instruction, a établi beaucoup d’éléments à charge. Et cet homme de 55 ans devrait être renvoyé prochainement devant le tribunal correctionnel de Beauvais. Pour autant, il ne devra pas répondre de tous les vols dont on le soupçonne : soit les preuves manquent, soit les faits sont prescrits. C’est le cas du cambriolage chez Philippe Courtial.

La tante, elle, devrait être jugée pour complicité. Pendant 20 ans, elle a travaillé au château de Saint-Martin d’Ablois.

Mes Stéphane Diboundje et Hubert Delarue ne devraient pas avoir à plaider. Pour leurs clients respectifs, le fils et le père, le parquet a demandé un non-lieu dans son réquisitoire définitif. Il a fait de même pour le quatrième complice présumé.

GAUTIER LECARDONNEL

Source Le Courrier Picard