Fraude à la TVA: l’ancien garagiste de Camon et ses complices de Saint-Quentin doivent rembourser plus de 17 millions d’euros

Il y a près de 20 ans, la « fraude au carrousel » leur avait permis de mener grand train : cinq prévenus viennent de voir leur peine pénale réduite en appel. Mais les sommes à rembourser restent colossales.

Les voitures, achetées en Belgique et en Allemagne, étaient revendues en France mais via des sociétés écrans basées au Luxembourg et en Espagne.
Les voitures, achetées en Belgique et en Allemagne, étaient revendues en France mais via des sociétés écrans basées au Luxembourg et en Espagne.
Image auteur par défaut

Par Gautier LecardonnelJournalistePublié:12 Octobre 2023 à 17h56Temps de lecture:3 minPartage :

Le temps aura joué en leur faveur puisqu’aucune peine de prison ferme n’a été prononcée. Le mardi 9 octobre, la cour d’appel de Douai a rendu son arrêt concernant une vaste fraude à la TVA qui avait fait l’objet d’un procès en décembre dernier  : alors qu’en première instance, des suspects s’étaient vus infliger jusqu’à 3 ans de prison ferme, les principaux protagonistes ressortent de cette longue procédure judiciaire avec, pour deux d’entre eux, des condamnations à 4 ans de prison avec sursis, et pour un troisième à 3 ans de prison assorti d’un sursis probatoire. Les trois autres prévenus concernés par cet appel (ils étaient sept lors du premier procès) sont, pour leur part, sanctionnés d’amendes de 10 000, 15 000 et 150 000 euros.

Vingt ans après, la principale sanction reste inchangée, et elle est financière puisque sur le plan civil, les protagonistes de cette affaire devront solidairement rembourser le fisc à hauteur de… 17 382 176 euros. Deux des mis en cause ont vu la solidarité se limiter à 4,8 millions pour l’une et 1,2 million d’euros pour le deuxième.

Les sommes sont à la mesure de celles détournées au cours des années 2003 et 2004. Cette fraude, dite «  au carrousel  » est considérée comme la plus juteuse de l’histoire : elle fait perdre chaque année quelque 50 milliards d’euros à l’union européenne, les états éprouvants les pires difficultés à y remédier. L’affaire qui vient de trouver son issue à Douai illustre parfaitement comment les petites « magouilles » pouvaient permettre d’engendrer rapidement des sommes très importantes.

Il avait déposé 830 000 euros sur ses comptes en deux ans

Un Samarien alors âgé de 30 ans s’était fait remarquer dans les PMU d’Amiens et alentours, lui qui roulait dans des voitures de luxe, faisait des très gros paris aux courses et possédait même, sous le nom de son père, des chevaux de courses. Les gendarmes avaient établi qu’il avait déposé 830 000 euros sur ses comptes en deux ans. L’homme trempait dans le business du dépôt-vente de véhicules. Les enquêteurs avaient vite ciblé les garages Auto Sélection de Camon, dont l’activité avait été transférée à Saint-Quentin sous le nom d’Auto passion.

Au final, la section de recherches d’Amiens mettra à jour la fraude : les voitures vendues en Picardie étaient achetées en Allemagne et en Belgique, et par le jeu de sociétés écrans basée au Luxembourg et en Espagne, les malfrats faisaient croire à l’administration que la TVA avait été payée de l’autre côté des Pyrénées, alors qu’ils se la mettaient dans la poche. Sept suspects, dont un habitant du Santerre, seront finalement appréhendés dans cette affaire.

Vingt ans après, l’histoire est donc close. Même si une suite est possible, selon Mes Stéphane Diboundje et Pascal Bibard, qui défendent l’un des suspects : «  Nous réfléchissons à intenter une action en responsabilité de l’État pour délai déraisonnable de la procédure car nous considérons qu’il s’agit là d’un dysfonctionnement certain du service public de la justice  ».

source courrier picard:https://www.courrier-picard.fr/id456997/article/2023-10-12/fraude-la-tva-lancien-garagiste-de-camon-et-ses-complices-de-saint-quentin