Elle se serait bien passée de cet honneur : après l’affaire de la CAF, l’ancienne adjointe au maire d’Abbeville a été relaxée mardi d’aide au séjour irrégulier d’un étranger.
 
En mai 2012, Norhouda Rahouadj est « la femme à abattre », selon les mots d’un de ses avocats, Pascal Bibard. En un mois, ce symbole de l’intégration, présidente départementale des Restos du cœur pendant dix ans, est placée deux fois en garde à vue : d’abord parce qu’elle a touché indûment des prestations sociales (elle sera relaxée en appel), ensuite car elle aurait favorisé l’entrée et le séjour en France de Benaoumeur M., un Algérien. Très rapidement, le maire de la capitale du Ponthieu, Nicolas Dumont, retire ses délégations à sa colistière. « Principe de précaution » diront les uns, « mépris de la présomption d’innocence », commente Me Stéphane Diboundje.

Le doux fumet de la politique

Hier, ses avocats n’ont pas éludé la question du contexte, centrale dans ce dossier. « François Hollande venait d’être élu sur le thème de la République exemplaire, se souvient Me Bibard. Les élections législatives se profilaient, auxquels M. Dumont souhaitait participer.  »
Selon lui, rien n’est moins innocent, dans l’affaire de la CAF, que ce courrier du président (PS) du conseil général de la Somme, Christian Manable, qui réclame à la justice une « punition exemplaire ». L’avocat en est persuadé : « Il s’agissait de mettre des bâtons dans les roues à Nicolas Dumont dans l’optique de la candidature de Mme Boistard. Il fallait abattre Mme Rahouadj pour atteindre plus haut ».
 
Deux ans et demi plus tard, la procureur Françoise Dale, avec honnêteté, n’a même pas soutenu la culpabilité de Norhouda Rahouadj et encore moins de Banaoumeur. Il faut dire que la présomption de mariage blanc fait long feu. Il est toujours marié, a obtenu de la préfecture un permis de séjour de dix ans et, mieux, s’est fait embaucher… à la mairie d’Abbeville. Comme clandestin, on a vu plus discret. De toute façon, sur le terrain judiciaire, une loi de janvier 2013 a dépénalisé le séjour irrégulier et l’aide dans un but humanitaire. Or c’est par pitié que Nordhouda, 55 ans, qui est maintenant garde d’enfants, avait hébergé pendant deux nuits son ami d’enfance.
 
Le mot de la fin à Me Crépin : « C’est un dossier abbevillois. Le commissariat a essayé de se faire les Rahouadj. » C’est (en partie) raté.`
 
TONY POULAIN

 

Source Le Courrier Picard